En 1984, feu Hassan II (Roi du Maroc dans le temps), souhaitait l’adhésion du Maroc à la CEE, et il déposa une demande en ce sens. Mais, sa requête fut rejetée par la commission économique européenne.

Mohammed-VI-Zambie-1024x683Son successeur, le Roi Mohammed VI, a compris que l’avenir du Maroc ne se jouerait plus en Europe, mais plutôt en Afrique. Et pour cause ! l’Europe, comme on peut le constater, est de plus en plus fragile économiquement et politiquement. Avec le Brexit, et les partis d’extrême droite,  qui se profilent  partout, même en Autriche et en Allemagne, sans oublier la famille Le Pen en France, qui est donnée gagnante dans les sondages à l’heure où nous rédigeons cet article.

D’après l’ambassadeur du Maroc en France Chakib Benmoussa, le Royaume chérifien ‘’développe avec tous les pays d’Afrique des relations d’égal à égal qui permettent d’affronter les défis d’un monde ouvert’’.

Croissance démographique, agriculture, énergie, santé…, les challenges sont nombreux.

Il a aussi affirmé que parmi les défis à relever ensemble figurent dans la dimension africaine, notamment la croissance démographique importante que connait le continent et les opportunités de développement offertes dans plusieurs pays africains.

Par ailleurs, les liens séculaires, culturels et spirituels existant entre le Maroc et l’Afrique, soulignant que la politique africaine du royaume ne cesse de se renforcer pour s’exprimer à travers plusieurs canaux. Les différentes visites effectuées par le Roi Mohammed VI dans plusieurs pays africains, ajoutant que ces déplacements du souverain sont couronnés par la signature de plusieurs conventions portant sur le développement de plusieurs secteurs dans ces pays.

Les relations économiques avec l’Afrique sont développées dans le cadre d’une coopération multidimensionnelle, il n’y a qu’à voir l’action menée par le Royaume pour encourager l’investissement en Afrique dans le cadre de Partenariats public-privé et privé-privé.

Selon l’ambassadeur marocain, le Royaume considère que les pays d’Afrique peuvent partager leurs expériences, rappelant, à cet égard, l’importance de l’expérience marocaine grâce aux stratégies mises en place, notamment dans les domaines de l’agriculture, de l’énergie, de l’électrification, de la santé et de la formation.

Il a aussi indiqué que le Maroc représente une plateforme pour le développement d’une coopération Nord-Sud réussie au profit des pays africains, insistant dans ce sens sur le rôle du partenariat entre le Maroc et la France.

Sur un autre registre, il a noté que les opérateurs économiques marocains ont mis en place des approches innovantes en Afrique, notamment dans le secteur bancaire et agricole.

Le Maroc veut intégrer  la CEDEAO

Comme on peut le lire sur le site « 360 Afrique », quelques semaines après le discours de Mohammed VI lors du 28ème Sommet de l’Union africaine où il avait parlé de la flamme éteinte de l’UMA, le Maroc se tourne vers l’Afrique subsaharienne et demande officiellement à intégrer la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

Le ministère des Affaires étrangères et de la coopération a publié le 24 février 2017, un communiqué où il a annoncé que le Maroc a officiellement demandé à adhérer, comme membre à part entière, à la Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

« Dans le contexte de la Tournée Royale en Afrique (lit-on dans ce communiqué), et notamment dans certains pays d’Afrique de l’Ouest, et sur de très hautes instructions de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, le Royaume du Maroc a informé, aujourd’hui (le 24 février dernier NDLR) Son Excellence Madame Ellen Johnson Sirleaf, Présidente du Liberia et Présidente en exercice de la Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), de sa volonté d’adhérer à cet ensemble régional en tant que membre à part entière.

Cette demande se fait en conformité avec les dispositions du Traité fondateur de la CEDEAO, et en satisfaction totale de ses critères d’adhésion.

Pourquoi la CEDEAO ?

Toujours selon le site cité ci-dessus, la démarche du Maroc vient couronner les liens forts aux niveaux politique, humain, historique, religieux et économique avec les pays membres de la CEDEAO. Ces liens se sont renforcés au cours des dernières années, à travers les 23 Visites Royales dans 11 pays de la région. Plusieurs centaines d’accords conclus au cours de ces Visites Royales, ont donné une impulsion forte à la coopération bilatérale avec les 15 pays membres de l’Organisation.

Le Maroc entretient, également, des liens institutionnels avec la CEDEAO, à travers son Statut d’Observateur, obtenu depuis plusieurs années. A ce titre, le Maroc a participé à de nombreuses réunions de l’Organisation, et apporté sa contribution à ses activités, notamment dans les domaines liés à la paix et la stabilité.

Ainsi, le Royaume a participé à des opérations de maintien de la paix dans région (notamment en Côte d’Ivoire) et aux efforts de médiation pour la résolution des conflits (médiation dans la crise des pays du Fleuve Mano ; contribution à la résolution de la crise institutionnelle grave en Guinée en 2009-2010 ; contribution à la stabilisation de Guinée Bissau…).

Le Royaume a, de même, entrepris des actions de solidarité avec les pays de la région, notamment durant la période de la pandémie d’Ébola, et face aux catastrophes naturelles que certains pays ont connues. Il a, en outre, initié avec les pays de la CEDEAO des projets structurants, comme le Gazoduc Maroc-Nigeria à travers les pays de la région, et comme la promotion d’un Espace Nord-Ouest Africain comme espace de stabilité et développement.

Cette volonté d’adhérer à la CEDEAO s’inscrit, en outre, dans la Vision Royale de l’intégration régionale comme clé de voute du décollage économique de l’Afrique.

Elle intervient dans la droite ligne de la politique africaine du Souverain, couronnée par le retour du Royaume à l’Union Africaine.

Le Maroc et l’Union Africaine

Le Maroc est officiellement membre de l’Union africaine. Un large consensus s’est formé autour de la demande d’adhésion du Royaume.

Le Maroc qui avait quitté l’ex Organisation de l’Union Africaine (OUA) en 1984 est réadmis officiellement à l’actuelle UA en tant que membre de cette organisation panafricaine.

Cette réintégration est le résultat du large consensus qu’a permis un groupe de 39 pays africains mobilisés derrière le Maroc. Ce groupe a imposé la réintégration du Royaume sans passer par le vote qui aurait été, de toute façon, très majoritairement en faveur du Maroc.

D’après Karim Zeidane (chroniqueur dans 360 Afrique), cette décision est intervenue après une ‘’âpre résistance de la délégation algérienne’’ qui a soulevé la question des frontières.

Le nouveau président de l’Union africaine, en la personne d’Alpha Condé, président de la Guinée, excédé par les Algériens qui demandaient un report, a opté pour le respect de la majorité écrasante des États membres.

Le transfert du savoir-faire marocain, l’autre engagement africain du royaume

« Notre action s’est particulièrement attachée à la question de la formation qui est au cœur de notre coopération avec les pays frères. Ainsi, des ressortissants africains ont pu poursuivre leur formation supérieure au Maroc, grâce aux milliers de bourses qui leur ont été accordées », a en effet mis en exergue le souverain, dont l’action menée sur le terrain des pays visités a été tant appréciée et saluée autant par les ses homologues que par les peuples africains frères.

Y a-t-il une dimension humaine dans la stratégie africaine du Royaume ?

Déjà en juin 2014, Salaheddine Lemaizi, dans un article virulent , paru sous le titre « MarocAfric » ou l’investissement marocain en Afrique subsaharienne, dénonçait l’opportunisme et la prédation du Maroc envers l’Afrique.

Dans l’extrait suivant, tiré de cet article cité ci-dessus,  on peut lire : « la présence économique marocaine en Afrique profite d’abord à la « galaxie royale » composée d’entreprises appartenant au roi Mohammed VI et son oligarchie. L’investissement marocain en Afrique subsaharienne a trois implications pour le Maroc. Primo, la persistance du mélange entre l’argent public et privé. Ceci s’est manifesté en février dernier lors de la visite du Roi à quatre pays africains (Mali, Côte d’Ivoire, Guinée Conakry et Gabon).

Lors de ce périple de 20 jours, la confusion persiste entre le rôle de chef d’État et d’homme d’affaire qu’il incarne. On ne savait pas si c’était le businessman en prospection de nouveaux marchés ou l’homme politique qui était en mission diplomatique.

Ce mélange des genres se pose aussi pour des membres du gouvernement actuel, spécialement M. Hafid Alami, ministre du commerce et de l’industrie. Cet homme d’affaires détient la société Saham, géant de l’assurance au Maroc et dans le reste de l’Afrique.

Dans le même ordre d’idée, le choix des entreprises privées qui ont accompagné le Roi pose plusieurs questions : le régime favorise-t-il des entreprises qui lui sont proches au détriment d’autres entreprises ? « Le Maroc a, en effet, combiné le lobbying politique avec l’aide au développement et l’incitation des opérateurs privés à trouver des partenariats en Afrique. »

Trois ans après l’apparition de cet article, on se rend compte que Mr Salaheddine Lemaizi a tout analysé de travers, car si le pragmatisme est le socle de la stratégie africaine du Maroc, le Royaume n’a toutefois pas sacrifié à un choix profondément humaniste qu’il a toujours fait sien, élevant la dimension sociale au rang de priorité absolue.

A preuve, cette politique migratoire exemplaire initiée par le Royaume en faveur des frères africains que la précarité a menée au Royaume de l’humanisme. « Nous agissons pour que les couples, en particulier les couples mixtes, composés de Marocains et de conjoints subsahariens, ne soient pas séparés (…)

Toutes ces actions constructives, en faveur des immigrés, ont ainsi justement conforté l’image du Maroc, et renforcé les liens que nous avions d’ores et déjà constitués.

« Certains avancent que, par cet engagement, le Maroc viserait à acquérir le leadership en Afrique. C’est à l’Afrique que le Royaume cherche à donner le leadership », a précisé le souverain, en réponse à certains milieux résolument hostiles au retour du Maroc au sein de sa famille africaine.

Avec mes compatriotes marocains nés ou vivants en France, nous rêvions d’une union maghrébine semblable à la CEE, car les pays du Maghreb, parlent la même langue, possèdent la même religion et les mêmes traditions, et la cerise sur le gâteau, des cerveaux éparpillés dans le monde entier.

Hassan II avait répondu  jadis à un journaliste français qui lui demandait son sentiment sur la communauté maghrébine vivant à l’étranger, « qu’il suffit de rapatrier tous nos cerveaux qui vivent à l’étranger, et nous serions d’égal à égal avec les européens, car avec l’Algérie et la Lybie qui possèdent le pétrole, et le Maroc et la Tunisie qui possèdent des richesses agricoles, nous serions complètement autonomes. » Mais hélas, le contexte politique de l’époque ne le permettait pas.

Mohammed VI a raison : Pourquoi se limiterait-on aux pays du Maghreb (dis pays de l’Union  du Maghreb Arabe ou UMA ndlr) ? Toute l’Afrique a besoin de nous et nous, nous avons besoin de l’Afrique !

Par Mustapha Bouhaddar, Maghreb Canada Express, Pages 16-17, Vol. XV, N° 03, MARS 2017 .

Pour lire l’Édition de Mars 2017, cliquer sur l’image :

 

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