Ce n’est pas la première fois que Nicolas Sarkozy est impliqué dans une affaire de versements occultes. Il faut dire que l’ancien président a fait ses classes avec Jacques Chirac qui a été impliqué jadis dans ce genre d’affaires. A l’image de Chirac, Sarkozy s’en est toujours sorti avec un non-lieu. Sa dernière garde à vue remonte à l’affaire Bettencourt pour abus de faiblesse.

L’affaire Karachi

L’ancien chef de l’Etat a été entendu dans le volet de l’affaire de Karachi sur le financement présumé occulte de la campagne présidentielle d’Edouard Balladur en 1995.
En effet, lorsqu’il était premier ministre (1993-1995), Edouard Balladur avait mis en place un système de commissions pour faciliter la conclusion de contrats d’armement – sous-marins et frégates – avec le Pakistan et l’Arabie saoudite. Ces pots-de-vin, légaux à l’époque, étaient pudiquement appelés « frais commerciaux exceptionnels ».
Dans cette affaire, le cas de Nicolas Sarkozy reste en suspens. Les juges Van Ruymbeke et Le Loire estiment qu’il revenait à la CJR de l’entendre sous le statut de témoin assisté. Il est reproché à M. Sarkozy, ministre du budget en 1995, d’avoir donné son feu vert à la conclusion des contrats controversés, contre l’avis de sa propre administration. La CJR pourrait donc chercher à recueillir ses explications, voire le mettre en examen. On connait la suite, Nicolas Sarkozy s’en sort comme d’habitude.

L’affaire libyenne

En juin 2016 « Mediapart » publie un dossier qui s’intitule « Sarkozy-Kadhafi: notre dossier », Edwy Plenel y explique qu’au détour de l’enquête sur l’affaire Karachi, Mediapart en a vu apparaître une autre au printemps 2011 : celle du financement de la campagne 2007 de Nicolas Sarkozy par la Libye de Kadhafi.

Liaison fatale

Le 23 juillet 2015, Mediapart dévoile que des vérifications téléphoniques prouvent que l’intermédiaire Alexandre Djouhri, proche de Claude Guéant, a bien organisé l’exfiltration de Paris vers le Niger du dirigeant libyen Bachir Saleh, sous le coup d’un mandat et d’une notice rouge d’Interpol, en 2012. Le tout en présence de l’ancien patron des services secrets intérieurs, Bernard Squarcini.

Alors que l’ancien ministre de l’intérieur assure avoir obtenu, en 2008, 500 000 euros de la vente de deux tableaux d’un maître néerlandais, les investigations révèlent que le banquier soupçonné d’avoir effectué le virement en sa faveur, Wahib Nacer, était l’un des gestionnaires des comptes de Bachir Saleh, le patron du puissant fonds d’investissement libyen en Afrique.

Une expertise judiciaire, commandée par deux juges chargés d’instruire la plainte pour « faux et usage de faux » de Nicolas Sarkozy après la publication par Mediapart d’un document officiel libyen sur des soupçons de corruption, conclut à un « document authentique ayant existé sur support physique ». Une précédente expertise avait déjà conclu à l’authenticité de la signature, attribuée à l’ancien chef des services secrets libyens.

50 millions pour Sarkozy : l’accusation de l’ancien chef de l’Etat Libye

Le 7 février 2014, Mediapart révèle : « Oui, Kadhafi a financé la campagne électorale de Nicolas Sarkozy et a continué à le financer encore après 2007 », écrit le premier chef de l’État libyen après la chute de Kadhafi, Mohamed el-Megarief, dans le manuscrit original d’un livre publié en janvier. « 50 millions ont été versés pendant la campagne électorale », affirme-t-il, révélant « un dernier versement » intervenu en 2009. Mediapart s’est procuré le manuscrit non caviardé par l’éditeur.

D’ailleurs, Un rapport de synthèse de la gendarmerie accrédite l’authenticité du document officiel libyen, révélé par Mediapart, sur le financement occulte de Nicolas Sarkozy en 2007. Entendu au Qatar par les juges, l’ancien chef des services secrets du régime Kadhafi, Moussa Koussa, a de son côté affirmé que le contenu du document « n’ (étai) t pas faux ».

Ziad Takieddine l’ami  encombrant

Le Franco-Libanais Ziad Takieddine qui jouait l’intermédiaire entre Kadhafi et Sarkozy a été mal récompensé par ce dernier. Il a connu le même scénario avec l’ancien ministre du budget Jean François Copé à qui il a offert beaucoup de cadeaux dont une Rolex que ce dernier a nié. Et pourtant, il existe des photos de Copé en train de se baigner dans la piscine du Franco-Libanais.

Selon Mediapart, Ziad Takieddine  est le suspect n°1 dans le volet financier de l’affaire Karachi. Il est aussi celui dont les secrets mettent en danger la présidence de la République. Mediapart dévoile une série de documents et de photos inédites entre l’homme d’affaires franco-libanais Ziad Takieddine et le premier cercle du chef de l’État. Sont concernés: Brice Hortefeux, Thierry Gaubert, Jean-François Copé, Claude Guéant, Pierre Charon, Dominique Desseigne.

Ziad Takieddine est un contribuable comblé. Le marchand d’armes ami de la Sarkozie, principal suspect dans le volet financier de l’affaire Karachi, ne paie pas d’impôt sur le revenu, ni d’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Résident fiscal en France, il y possède un patrimoine estimé à plus de 40 millions d’euros, selon des documents obtenus par Mediapart.

Il s’agit de l’un des secrets les mieux gardés du clan Sarkozy. L’homme d’affaires Ziad Takieddine, principal suspect dans le volet financier de l’affaire Karachi, devait toucher en 2003 des commissions occultes d’un montant de 350 millions d’euros dans le cadre d’un marché d’armement avec l’Arabie saoudite. Les fonds devaient être versés, sous l’autorité de Nicolas Sarkozy, via une société contrôlée par le ministère de l’intérieur.

L’invité du Journal télévisé de 20 h

En ce moment c’est la mode en France, chaque fois qu’un politique est mis en examen, il passe sur TF1. Sarkozy n’échappe à la règle, et comme le décrit bien Martin Pimentel de Mediapart : «  Mine grave, regard noir, Nicolas Sarkozy avait décidé de prendre les Français à témoin dans la préparation du procès qui se précise. Sarkozy, qui a déjà défendu son honneur « pendant de longues heures » devant les juges, semblait en avoir gros sur la patate.»

Nicolas Sarkozy est ulcéré : on met la parole de Ziad Takieddine, l’intermédiaire sulfureux qui a fait de la prison pour des magouilles financières, au même niveau que celle d’un ancien président. Ce dernier affirme qu’il ne l’a pas revu depuis 2004. Plus que des mensonges, les « allégations » de cet « escroc » sont pour Sarkozy une « ignominie » et il compte bien apporter la preuve que ce « malfaiteur » a menti à plusieurs reprises auprès des juges.

Où sont les documents bancaires ? Où sont les virements ? « Tous ces assassins et ces criminels ne produisent aucune preuve ». Là, on vous rassure, il ne parle pas d’Edwy Plenel. Mais bien de Kadhafi, ce « fou illuminé » qui se droguait. Il enregistrait tout. Nicolas Sarkozy le demande donc aux Français les yeux dans les yeux : « comment se fait-il qu’il n’y ait pas la moindre preuve ? » A travers lui, ce serait la France qui serait mise « en cause ».  « Je pourfendrai cette bande et ferai triompher mon honneur », a-t-il proclamé.

Est-ce un procès politique ?, veut savoir Gilles Bouleau. L’interviewé lève les yeux au ciel. Une justice sous influence en France, non, ce n’est pas sérieux…

Une affaire qui se terminera probablement par un non-lieu

Comme l’écrivait l’écrivain suisse John Petit-Senn : « Un pouvoir corrupteur perd et flétrit ceux qu’il place au-dessus des autres, c’est la corde qui élève les pendus. »

Certains témoins de cette affaire meurent accidentellement au coin d’une rue, ou dans le Danube, d’autres disparaissent tout simplement. Nicolas Sarkozy aura surement un non-lieu, comme d’habitude. Si on examine son parcours en tant que Président des Français, il sera probablement, le plus bling bling,  le moins cultivé, le moins charismatique, et le plus malin. Une vraie racaille au col blanc !

Par Mustapha Bouhaddar, pour Maghreb Canada Express, page 12, Vol. XVI, N° 4, Avril 2018

Pour lire  l’édition du mois d’Avril 2018, cliquer sur l’image:

 

By AEF