Le nouveau rapport du Giec, publié le 25 septembre 2019, confirme une tendance qui se dessinait depuis plusieurs années : le nombre de réfugiés climatiques sera à terme inquiétant.

En effet, d’après ce rapport, la fonte des calottes polaires et des glaciers conjugués à la dilatation thermique des eaux marines fait monter le niveau des océans. Une hausse de plus de 40 cm environ est attendue d’ici à 2100 dans le scénario optimiste où le réchauffement global ne dépasserait pas 2 °C. L’élévation du niveau des mers se poursuivra au rythme de « plusieurs centimètres » chaque année. En conséquence, les experts anticipent le déplacement de 280 millions de personnes dans le monde.

D’après François Gemenne, spécialiste des flux migratoires et chercheur à Sciences Po Paris, le rapport n’est pas encore finalisé et c’est à ce moment-là que nous aurons les chiffres définitifs. Mais il est certain qu’un grand nombre de personnes devront quitter leur lieu de vie à cause de la hausse du niveau des mers.

En effet, historiquement, les gens se sont toujours installés près des côtes parce que les communications étaient plus faciles, le sol plus fertile et encore aujourd’hui, ce sont des zones qui continuent à attirer énormément de gens.

Il ne faut pas uniquement parler de ces migrants au futur car c’est déjà une réalité aujourd’hui du fait du changement climatique. C’est un des premiers facteurs de déplacement des populations dans le monde. L’essentiel de ces déplacements ont lieu à l’intérieur des frontières d’un pays et ce n’est pas pris dans les statistiques.

Toujours d’après François Gemenne, les tensions politiques et les crises dans l’Union européenne qu’amène chaque nouveau bateau d’ONG qui recueille des migrants, nous montre qu’il est difficile  d’envisager sereinement le déplacement et la relocalisation de milliers de personnes.

C’est pourtant une question que nous devons nous poser dès maintenant si nous voulons éviter les crises humanitaires. Quand on voit la difficulté que nous avons eue pour reloger les personnes après la tempête Xynthia, nous comprenons que nous sommes très mal préparés.

D’après le journaliste Benjamin Bathke, dans un article publié sur le site « Infomigrants », le 18//10//2019, « Depuis le début de l’année, plus de 7 millions de personnes ont été poussées à l’exode à cause de catastrophes naturelles renforcées par les effets du changement climatique.

Les ravages causés par l’ouragan Dorian aux Bahamas est le plus récent indicateur que les personnes déplacées en raison de catastrophes naturelles et de changement climatique sont un phénomène global de plus en plus important. Des dizaines de personnes ont perdu la vie, des milliers d’autres sont toujours portées disparues et on estime à près de 76.000 le nombre de personnes ayant perdu leur domicile.

D’autres exemples ont frappé l’Asie, où dans trois pays les inondations de la mousson ont forcé plus d’un million de personnes à prendre la fuite. Le cyclone Fani a provoqué des millions d’évacuations en Inde et au Bangladesh. Le cyclone Idai s’est abattu sur le Mozambique, le Malawi, le Zimbabwe et Madagascar. D’autres inondations ont frappé l’Éthiopie, les Philippines, la Bolivie et l’Iran, où les pires inondations en 100 ans ont touché deux tiers du pays.

Dans la revue « Cultures &Conflits » Michèle Morel et Nicole de Moor, dans un article intitulé « Migrations climatiques : quel rôle pour le droit international ? «  Ont fait une analyse sur le rôle des différentes branches du droit international concernées par les migrations climatiques : « le droit international de l’environnement, le droit international des droits de l’homme, le droit international des réfugiés et le droit international des migrations. Même s’il ne porte formellement qu’une attention limitée aux migrations climatiques, le droit de l’environnement joue implicitement un rôle significatif dans leur prévention en assurant la protection de l’environnement naturel.

Les droits de l’homme, bien qu’ils nécessiteraient une application plus rigoureuse, jouent un rôle important tant d’un point de vue normatif que préventif dans la protection des migrants climatiques et ce de trois façons (dans le pays d’origine, dans le pays de destination et pour ce qui concerne le refoulement).

Le droit des réfugiés est un « palliatif », assurant la protection des migrants forcés dont les droits ont été violés. Enfin, le droit de la migration, dans son état actuel, est particulièrement pertinent en ce qui concerne les droits que les migrants climatiques, devenus travailleurs migrants dans un pays étranger, sont en mesure de faire valoir dans le pays où ils sont employés.

Malgré leurs défauts respectifs, ces quatre branches du droit international ont un rôle spécifique et important eu égard à la problématique des migrations climatiques. Isolément, leur fonction est limitée, mais envisagées conjointement, elles forment un dispositif satisfaisant. »

Les deux auteurs cités ci-dessus, concluent : « Les juristes, les organisations spécialisées et les décideurs devraient en conséquence penser et travailler d’une manière interdisciplinaire afin de parvenir à une solution cohérente au problème des migrations climatiques. »

Par Mustapha Bouhaddar, pour Maghreb Canada Express, page 13, Vol. XVII, N°11 , Novembre 2019.

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