Par Abdelfettah EL FATIN Chercheur en droit international. Docteur en droit économique international et européen et professeur à la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales à l’université Hassan II (Casablanca, Maroc)
Le Sommet sur la gestion des déplacements massifs de réfugiés et migrants, organisé en marge de la 71e assemblée générale de l’Organisation des Nations unies s’est conclu par l’adoption par tous les Etats membres de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants.
Ce texte politique, de nature déclaratoire, exprime la volonté des dirigeants du monde à protéger les droits des réfugiés et des migrants, et à se partager la responsabilité des mouvements massifs à l’échelle mondiale. Les Etats signataires s’engagent à entamer des négociations menant à une conférence internationale et l’adoption d’un pacte mondial en 2018.
Responsabilités partagées et coopération internationale
Face à un niveau sans précédent de mobilité humaine et face à cette « tâche morale et humanitaire », la déclaration de New York répond au programme de développement durable à l’horizon 2030 afin de « faciliter la migration et la mobilité de façon ordonnée, sure, régulière et responsable par la mise en œuvre de politiques migratoires planifiées et bien gérées ».
Comme est souligné dans ce programme, « ne laisser personne de côté» appelle à la mise en pratique de la responsabilité partagée et la coopération internationale dans la gestion des mouvements massifs des déplacés. Cette coopération aura comme de fond le respect des buts et principes des Nations Unies et de la déclaration universelle des droits de l’homme. Cette déclaration s’appuie entre autres sur des programmes cadres internationaux (cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes 2015-2030, l’accord de Paris, le programme d’action d’Addis-Abeba issu de la 3ème conférence internationale sur le financement du développement, le Sommet mondial sur l’action humanitaire (2016), le processus de Bali sur le trafic des migrants, le processus de Rabat, le plan d’action de la Valette et la déclaration et le plan d’action du Brésil, le rapport du secrétaire général « sécurité et dignité, gérer les déplacements massifs de réfugiés et de migrants» établi en application de la décision 70/539 de l’Assemblée générale des Nations Unies …etc).
Traiter le déplacement massif de population dans sa globalité
Comptant sur cette assise juridique et politique internationale, les Etats signataires de la déclaration de New York se sont engagés à prendre des mesures envers à la fois les migrants et les réfugiés, voulant ainsi traiter les déplacements massifs de population dans « sa globalité ». Il s’agit là de mettre en place des procédures de contrôle, de collecte des données, de vérification des identités aux frontières conformes au droit international des droits de l’homme et du droit international des réfugiés.
La déclaration appelle dans ce sens à un échange des « meilleures pratiques » observant impérativement le principe de « non refoulement ». Elle attache à la catégorie femme-enfants une attention particulière vu que ce sont les cibles les plus vulnérables, tout en concevant « des politiques criminalisant les déplacements transfrontières ». Le Sommet a mis l’accent sur la question du financement et a exhorté la communauté internationale à combler à cette lacune relative au financement de l’aide humanitaire.
Assurer la Sécurité et préserver la Dignité
Relativement aux réfugiés, la déclaration a proposé un cadre d’action global qui conduira à l’adoption d’un pacte mondial sur les réfugiés en 2018. La déclaration attire l’attention sur l’importance de la mise en place par les Etats de « politiques et règles d’admission des réfugiés conformes aux obligations imposées par le droit international ». Elle appelle à l’assouplissement des formalités administratives et leur accélération. L’assemblée des Nations Unies veillera à l’expansion des programmes d’admission humanitaires existants.
Par rapport aux migrants, la déclaration repose la protection de cette catégorie de déplacés massifs sur deux piliers à savoir « la sécurité » et « la dignité ». Elle aspire à ce que la migration soit un choix et non une nécessité. Les propositions faites dans ce sens sont conformes avec le droit international des droits de l’homme des migrants.
Dans ce sens, il faudrait encourager davantage « la coopération consulaire », « la réadmission des nationaux de retour » vu la contribution positive des migrants dans le développement. La déclaration encourage les Etats à ratifier la convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Elle appelle à une forte coopération entre l’Organisation internationale des migrations et l’ONU. Le sommet, par le biais de cette déclaration , veillera à l’élaboration de principes directeurs non contraignants et des directives volontaires dans le dessein de la protection des migrants.
La déclaration de New York, certes de nature déclaratoire et politique, reste une brèche dans la construction en continu d’une conscience collective internationale de la problématique des déplaces massifs.
Source : Maghreb Canada Express, 14ème année, Vol. XIV, N° 10, page 19, OCTOBRE 2016
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