mjLes délégations représentant les quatre gouvernements du Canada membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) vont au Sommet d’Erevan avec la même la détermination de promouvoir la langue française et préserver les valeurs fondamentales que se doivent de défendre à tout prix la Francophonie.

Des valeurs cardinales telles que la primauté du droit, le respect des droits de la personne, la démocratie et la liberté d’expression, qui sont chères aux yeux des Canadiens, et que le Canada n’a de cesse de promouvoir au sein de l’OIF.

Avant de s’envoler pour Erevan où elle doit participer à la Conférence ministérielle de la Francophonie (CMF), les 08 et 09 octobre, la ministre canadienne du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly, a tenue à préciser clairement l’importance de défendre, de renforcer et de promouvoir les valeurs de la Charte de la Francophonie et l’usage de la langue française à l’international : « Le Canada accorde, comme toujours, une grande importance aux valeurs de la Francophonie, dont la promotion de la paix, la démocratie et les droits de la personne […] Ces valeurs seront au cœur de nos interventions lors du Sommet de la Francophonie », dixit la ministre canadienne en charge de la Francophonie.

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, qui devra, lui aussi, participer au Sommet de chefs d’État et de gouvernement, les 11 et 12 octobre à Erevan, a également indiqué que la Francophonie joue un rôle de premier plan pour défendre des valeurs communes, et que, le Canada engage à défendre les droits de la personne, la démocratie et l’Etat de droit : « Vivre ensemble dans la solidarité, le partage des valeurs humanistes et le respect de la diversité : source de paix et de prospérité pour l’espace francophone », a souligné Justin Trudeau.

L’enjeu de ce Sommet d’Erevan est donc double pour les délégations canadiennes, mais également pour tous les autres États démocratiques, qui doivent parler d’une voix ferme et sans équivoque :

Premièrement, pour défendre les valeurs fondamentales qui sont au cœur même de la raison d’être de l’OIF, constituent le socle sur lequel se construit l’action de cette Organisation et font d’elle, une institution internationale sérieuse aux yeux du monde entier et respectueuse des principes démocratiques dans le monde francophone.

Deuxièmement, pour essayer de convaincre les autres États et gouvernements membres, de la nécessité de choisir, à la tête de cette précieuse organisation, une personne respectueuse des droits de la personne humaine et des principes démocratiques. Une telle personne serait plus encline à défendre vigoureusement les principes démocratiques, le respect des droits fondamentaux de la personne, l’État de droit et les libertés individuelles dans tout l’espace francophone.

En effet, il y a une tentative très inquiétante de la part de certains États de vouloir remettre en question les fondamentaux qui, depuis de dizaines d’années, ont fait la force de la Francophonie, en plaçant à sa tête la personne qui n’a rien à voir, ni avec la défense de la langue française dans le monde, ni avec la promotion des droits de la personne et des principes démocratiques.

Le Canada des Casques bleus, le Canada qui s’insurge courageusement contre les violations des droits de la personne en Arabie Saoudite, le Canada qui lève le tabou et prend la défense des minorités LGBTQ, le Canada qui brandit les droits et les libertés sans ambages, est attendu de pied ferme à Erevan par la Francophonie des peuples, des droits et des libertés. Il ne doit donc pas céder aux pressions exercées par certains pays qui veulent se servir de l’OIF pour leurs intérêts inavoués. Il doit résister aux tentatives de chantage exercées sur lui pour sacrifier ou remettre en question les valeurs fondamentales prônées par l’OIF et qui sont chères aux yeux des Canadiens.

Le premier ministre Legault devrait clarifier sa position

C’est ici l’occasion de lancer un appel vibrant au nouveau premier ministre du Québec, François Legault, qui semble hésiter à apporter son appui ferme au renouvellement du mandat de sa concitoyenne, de clarifier, lui aussi, sa position sans ambiguïté, emboîter les pas à Justin Trudeau, se donner les coudées franches pour résister aux pressions et défendre les valeurs fondamentales chères aux yeux des Québécois.

Le Québec est un acteur majeur qui contribue beaucoup au budget de l’OIF. À ce titre, son premier ministre, nouvellement élu, a bien raison de chercher à savoir comment est dépensé l’argent du contribuable québécois, alloué chaque année à cette organisation.

En effet, il y a quelques mois, sur instruction de Michaëlle Jean, l’OIF a mis en place un Groupe de travail sur la transparence pour justement déceler les faiblesses éventuelles et les corriger rapidement afin d’assurer une gestion efficiente, efficace et économe au cours des années à venir. Et, c’est le Québec qui a été chargé de présider cette commission.

C’est donc une opportunité que le Québec devrait saisir pour apporter son expertise, en contribuant à moderniser les politiques de l’OIF en matière de transparence, définir les règles et les normes les plus élevées de gestion et reddition de comptes, développer les bonnes pratiques et créer des conditions favorables à une saine gestion des ressources de cette organisation.

Ceci dit, il ne faut donc pas oublier, ni perdre de vue que le plus important pour l’avenir de l’OIF ce sont des valeurs fondamentales telles que la démocratie, la primauté du droit, le respect des droits de la personne, que les États membres doivent à tout prix protéger.

L’enjeu du XVIe Sommet de la Francophonie est beaucoup plus grand et complexe que le seul aspect de la gestion interne de l’organisation. Il est question ici de choisir entre, l’une et l’autre, de deux candidates : Michaëlle Jean, secrétaire générale sortante qui connait bien l’organisation et a fait ses preuves notamment dans la promotion de la langue française et la défense courageuse des droits de la personne et des principes démocratiques, d’une part, et Louise Mushikiwabo, ministre des Affaires étrangères du Rwanda et numéro deux d’un régime autoritaire, qui a le pire bilan en matière de respect des droits de la personne et des principes démocratiques, et a banni l’usage de la langue française dans l’enseignement et l’administration publique dans son pays : « au Rwanda, le français ne va nulle part » dixit-elle, d’autre part.

Bien plus alarmant encore pour l’OIF, il y a quelques jours passés, Louise Mushikiwabo, qui était l’invitée de Patrick Simonin, a avoué sur le plateau de la télévision TV5 que :  » Je ne connais pas encore assez l’organisation (OIF) pour émettre des avis… ». Cela prouve à suffisance que la Francophonie n’a jamais été parmi ses préoccupations. Sinon, comment la ministre des Affaires étrangères du Rwanda depuis bientôt dix ans, peut-elle expliquer sa méconnaissance de l’OIF, elle qui siège régulièrement à la Conférence ministérielle de la Francophone (CMF) – une des trois instances consacrées par la Charte de la Francophonie pour veiller à l’exécution des décisions de Sommets de la Francophonie -, et prétendre diriger cette organisation ?

Il n’est donc pas question pour le Canada, le Québec et de bien d’autres États démocratiques de cautionner, de quelque façon que ce soit, une telle candidature, simplement parce que les médias ont, à tort ou à raison, relevé quelques faiblesses dans la gestion et l’administration de la secrétaire générale sortante, qui a abattu un travail de titan en quatre ans.

Tous les États et gouvernements membres qui ont encore quelques hésitations quant à la gestion interne de l’organisation, peuvent être assurés que si Michaëlle Jean est réélue, elle sera appelée à renforcer et à mettre en place des équipes de travail dynamiques et talentueuses pour l’aider à atteindre ses objectifs d’assurer une gestion transparence et la reddition de comptes. De toute façon, Michaëlle Jean n’aura pas d’autre choix que de restructurer, renouveler son administration et renforcer ses équipes pour répondre aux préoccupations exprimées par les États membres.

Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue et ancien conseiller à la direction Afrique du ministère des Affaires étrangères du Canada

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