Surfer sur la vague de la peur à l’encontre de l’immigration semble profitable pour une certaine classe politique. Et pour cause ! Cette peur de l’autre semble s’exacerber au fil des ans au point que maintenant (et selon un récent sondage) presque la moitié de la population canadienne (49%) souhaite une baisse du seuil de l’immigration.
Historiquement, cette peur de l’Autre, avait failli, en 2007, faire d’un certain Mario Dumont un Premier ministre du Québec malgré lui et… elle avait surtout dessaoulé bon nombre parmi les néo-canadiens qui croyaient qu’il suffirait de réussir son examen de citoyenneté pour devenir citoyen à part entière !
Après l’euphorie, la gueule de bois
Déjà en mars 2007, nous avions écrit ce qui suit :
Mario Dumont avait dit tout haut ce que bon nombre de québécois de souche semblent murmurer tout bas… par ignorance de l’autre et par la faute à cet ‘’autre’’ qui semble croire que plier l’échine lui permettra d’éviter de se déraciner sous le souffle de la tempête.
Or la tempête est là pour rester tant et aussi longtemps que nous l’alimentions par notre silence et par notre inaction contre ceux qui s’improvisent nos porte-parole parmi des leaders religieux aussi bien que parmi ceux et celles qui se proclament laïques ou musulmans modérés.
Quant à nos racines, elles ont déjà été arrachées le jour où nous avions décidé d’immigrer. Et du coup, nous sommes devenus étrangers parmi ceux et celles qui nous avaient vu naître et grandir: Nos enfants avec leur accent québécois sont devenus des objets de curiosité quand ils ne deviennent pas tout simplement sujet à moquerie provoquant rire et délire!
Se taire et laisser faire les extrémistes de tout bord fera de nous des apatrides sinon des assimilés. Jamais des intégrés dans le sens de ces valeurs québécoises et canadiennes qui nous ont tant séduits au point de venir élire domicile dans ce pays.
Onze ans après, la question de l’immigration divise plus que jamais les canadiens
La peur grossit entre la population , et les derniers débordements de demandeurs d’asile à la frontière canado-américaine ne sont pas là pour arranger les choses: Le Premier ministre fédéral se trouva sur la sellette. Et quand il fut interpellé (le 16 août 2018) par une dame affiliée, semble-t-il, à un groupuscule identitaire sur la question, sa réplique ’’ Madame, votre racisme n’a pas de place ici’’ lui attira maintes reproches… Y compris de la part de certains de ses alliés qui veulent qu’il garde ‘’la tête froide’’
Or voilà que le débat sur l’immigration qui promet de s’enflammer une fois de plus (à l’approche des élections provinciales québécoise) avec François Legault qui veut MAINTENANT devenir Premier ministre, du moins si on se réfère à son slogan de campagne électorale ‘’Maintenant’’ et à sa réponse à Mario Dumont (ce 21 août 2018) qui lui demanda s’il tient toujours à renvoyer des immigrants chez eux..
Legault persiste et signe : Ceux parmi les immigrants qui ne réussissent pas un test de français ainsi qu’un test sur les valeurs québécoises avant 3 ans, se verront tôt ou tard montrer la porte de sortie.
Qu’en est-il de notre communauté dans tout cela ?
Bon nombre des membres de cette communauté note avec inquiétude la qualification des valeurs mises de l’avant de ‘’valeurs québécoises’’ au lieu de ‘’valeurs universelles des droits de la personne’’ par exemple. Et de se demander si le prétexte d’intégration ne cache pas une volonté d’assimilation inconditionnelle des nouveaux arrivants d’abord; de ceux et celles qui les ont précédé ensuite.
Cette inquiétude, voire cette peur, chez les membres de cette communauté est en train de s’exprimer à travers une ghettoïsation politique au sein d’un seul parti (un parti-refuge) au lieu de voir nos candidats refléter la diversité du paysage politique québécois.
Couillard lança ce matin , peut-être à la blague, que le slogan ’’Maintenant’’ de M. Legault voudrait dire ’’Maintenant la chicane’’.
Des centaines d’immigrants (d’êtres humains venus chercher un avenir pour leurs enfants au Québec) n’ont pas envie de rire; occupés à dompter la peur que maintenant , ils vont vivre l’inquiétude et l’incertitude au Quotidien.
Il serait peut-être temps de se regarder dans un miroir car, plus qu’un examen sur des valeurs, ce serait tout un examen de conscience que certains ont besoin de se passer.
Par A. El Fouladi, pour Maghreb Canada Express,, page 3, Vol. XVI, N° 08, Août-septembre 2018