« Démocratie, culture et changement social en Afrique du Nord » est le titre du nouveau livre du chercheur et auteur marocain Moha Ennaji

Publié par Cambridge Scholars au Royaume-Uni, ce livre collectif en anglais en 196 pages comprend 13 chapitres. Il aborde des questions relatives à l’évolution de la situation culturelle, religieuse et politique en Afrique du Nord après le printemps arabe. Il met en avant la culture de la différence et de la diversité, car, selon Moha Ennaji, « ce sont les valeurs de tolérance et de coexistence qui favorisent le processus de construction d’une société démocratique, et non les idéologies de négation, d’exclusion et d’extrémisme ».

Le livre souligne l’impact positif du multilinguisme sur le développement social et culturel et met en évidence la diversité culturelle de l’Afrique du Nord, qui a des racines multiculturelles et des valeurs communes telles que l’hospitalité, l’importance de la famille et la recherche d’un équilibre entre tradition et modernité.

Le livre affirme que la reconnaissance de la langue amazighe en Algérie et au Maroc comme langue nationale officielle est une reconnaissance du pluralisme linguistique et culturel, et la promotion de la culture amazighe est une contribution à la consolidation de la démocratie, l’établissement de l’État de droit et une barrière à toute forme d’exclusion.

Dans son chapitre, George Joffé (Université de Cambridge, Royaume-Uni) montre que le contexte politique en Afrique du Nord se caractérise aujourd’hui par des mouvements sociaux qui peuvent progressivement conduire à la consolidation de la culture démocratique et du processus de démocratisation.

Filippo Bignami (Université de Lugano, Italie) débat de la question de la citoyenneté et de la ville dans son rapport à la démocratie. Pour lui, il est possible de construire un système démocratique à partir de la ville et du cadre urbain en général.

Le chapitre de Moha Ennaji (Université Sidi Mohamed Ben Abdellah, Fès) avance que le mouvement amazighe est dynamique et n’a pas été affaibli par les concessions accordées par les gouvernements au lendemain du printemps arabe.  Le chapitre prédit que le mouvement amazigh continuera d’impacter le débat sur l’identité, la démocratie et les droits humains.

Lydia Guerchouh (Université Mouloud Mammeri à Tizi-Ouzou, Algérie) discute de l’impact des représentations socioculturelles véhiculées par l’arabe dialectal et le français sur l’apprentissage de la langue maternelle, le kabyle, dans un environnement urbain amazighophone.

Abderrahman El Aissati (Université de Tilburg, Pays-Bas) examine l’impact des médias sociaux sur la consolidation de la démocratie culturelle. Il aborde en particulier les domaines des arts et de la politique et la façon dont les individus et les communautés s’expriment.

Bouthayna Ben Kridis (Université de Carthage, Tunis) discute des aspects du multiculturalisme et de la démocratie en Tunisie après la révolution. Elle souligne la nécessité de réformes aux niveaux juridique, social et culturel afin de renforcer le processus de démocratisation, y compris la revitalisation de l’identité culturelle amazighe.

Driss Bouyahya (Université Moulay Ismail, Meknès) analyse l’évolution des mouvements amazighs et islamistes dans la quête d’inclusion, de réforme et de démocratie.  Il discute des questions d’identité, de religion et de démocratie comme concepts de base dans les mouvements amazighs et islamistes.

Fatima Sadiqi (Université  Sidi Mohamed Ben Abdellah, Fès) souligne le rôle de la culture orale et des voix des femmes dans la démocratisation et la modernisation de la société. Elle soutient que les femmes ont une grande possibilité de progresser grâce à leurs contributions culturelles, leur indépendance économique et financière, et leur participation à la société civile et au changement social.

Aziza Ouguir (Institut national de statistique et d’économie appliquée de Rabat) avance que les femmes soufies amazighes ont eu un impact sur leurs communautés grâce à leur legs à travers l’histoire. Elle explique que l’accomplissement des saintes amazighes  ouvre aujourd’hui la voie aux femmes pour atteindre des postes plus élevés grâce à la participation culturelle, démocratique et politique.

Hamid Bahri (Université de la Ville de New York) aborde la perspective amazighe dans les œuvres littéraires de deux écrivains maghrébins : Kateb Yacine et Mohammed Khaïr-Eddine. Tout en notant la cohabitation pacifique entre les groupes ethniques en Afrique du Nord, Bahri affirme qu’il faudrait travailler davantage au niveau individuel, collectif et éducatif pour consolider la cohésion sociale.

Kwesi Prah (Centre d’études avancées de la société africaine au Cap, Afrique du Sud) souligne la riche histoire de la langue et de la culture amazighes en Afrique et comment elle peut contribuer à la démocratie et à la protection des droits humains. Il déduit que l’utilisation des langues et des cultures autochtones est cruciale pour le développement de la culture démocratique.

Jan Jaap de Ruiter (Université de Tilburg, Pasy-Bas) se focalise sur la façon dont les partis populistes dans les démocraties occidentales, en particulier aux Pays-Bas, tentent de freiner l’influence des intégristes musulmans d’origine nord-africaine. Il conclut que les partis populistes ne sont pas sans impact sur la société et que, à cause d’eux, le discours anti-islamique s’est propagé aux partis politiques conventionnels et aux médias en Europe.

Dans le dernier chapitre, l’écrivain marocain Tahar Ben Jelloun a conversé dans une interview avec Moha Ennaji de son œuvre riche et variée,  et du problème de la migration en Europe. Il a également souligné l’importance du pluralisme culturel et linguistique dans la consolidation de la diversité et de la culture démocratique en Afrique du Nord.

Source : Moha Ennaji (1) pour Maghreb Canada Express, Vol. XXII, N°01, Page 07, Janvier 2024

(1) Moha Ennaji est un chercheur universitaire et écrivain marocain. En plus de ses publications en linguistique, il a écrit sur l’éducation, la migration et le genre, et il est l’auteur de plusieurs livres dont deux romans : « L’olivier de la sagesse » (éditions Karthala) et « Douce lumière » (éditions Marsam).

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