À l’heure où les cartes de la puissance se redessinent et où les priorités internationales évoluent, la question du Sahara marocain connaît une accélération significative.
Après le soutien clairement affiché des États-Unis et de la France – deux membres permanents du Conseil de sécurité – c’est désormais le Royaume-Uni qui vient s’aligner, par la voix de son nouveau ministre des Affaires étrangères, sur la position marocaine. Celui-ci a salué l’initiative d’autonomie proposée par Rabat comme étant « la base la plus crédible, réaliste et pragmatique » pour parvenir à une solution durable.
Ce positionnement de Londres marque une évolution notable dans l’équilibre des puissances au sein des instances onusiennes. Il ne s’agit pas d’un simple effet d’annonce diplomatique, mais bien d’un basculement stratégique de la part d’un État reconnu pour sa retenue, sa constance et son attachement aux usages diplomatiques les plus traditionnels.
La diplomatie britannique, historiquement prudente et peu encline aux revirements rapides, ne s’aventure jamais à la légère dans les déclarations de rupture. C’est pourquoi ce soutien clair à la proposition marocaine dépasse le cadre partisan : il reflète un réalignement plus profond au sein de l’appareil d’État britannique dans son ensemble – diplomatique, sécuritaire, militaire ,économique et politique.
L’Algérie à contre-courant
Face à cette dynamique internationale qui s’amplifie, l’Algérie semble camper sur des postures dépassées. Fidèle à une lecture idéologique héritée de la guerre froide, elle continue de faire du dossier du Sahara un levier d’affrontement régional, plutôt qu’un enjeu de construction maghrébine.
Cette persistance dans la logique de blocage traduit non seulement un isolement croissant, mais aussi une difficulté à s’ajuster aux transformations géopolitiques à l’œuvre. En refusant de penser la complémentarité économique et politique, Alger prend le risque de se marginaliser dans une région où la coopération devient un impératif.
Mais l’Histoire, elle, ne s’arrête pas. Ceux qui refusent d’évoluer avec leur temps finissent inévitablement par être dépassés.
Le Sahara marocain au cœur de la projection africaine de Rabat
Loin de s’enfermer dans la gestion du statu quo, le Maroc a choisi une approche proactive. Il a fait de ses provinces du Sud non pas un point de friction, mais un levier de développement continental.
Depuis les villes de Dakhla et Laâyoune, le Royaume articule une vision atlantique de coopération Sud–Sud. L’initiative royale visant à offrir un accès à l’océan Atlantique aux pays africains enclavés en est une pièce maîtresse. Il ne s’agit pas simplement d’une ambition logistique, mais d’un repositionnement stratégique des flux commerciaux et des chaînes de valeur africaines, dans un espace ouvert, fluide et souverain.
Dans cette perspective, le projet du gazoduc Nigeria–Maroc prend tout son sens. Traversant plus d’une dizaine de pays, il fait du Maroc une plateforme énergétique continentale, reliant l’Afrique de l’Ouest à l’Europe, en passant par les provinces du Sud.
Le Sahara marocain n’est pas un espace disputé : il est une interface d’intégration africaine, et un moteur de la nouvelle diplomatie économique du Royaume.
Washington ,Paris et Londres,ont acté. Pékin, elle, temporise.
En l’espace de quelques années, trois grandes capitales occidentales ont affirmé, chacune à leur manière, leur soutien à l’initiative marocaine d’autonomie au Sahara. Cette convergence diplomatique – de Washington à Londres, en passant par Paris – traduit un basculement stratégique clair?: la recherche de stabilité régionale passe désormais par une reconnaissance explicite de la souveraineté marocaine.
La Chine, pour sa part, entretient avec le Maroc une relation économique en plein essor. Partenaire de longue date dans les secteurs des infrastructures, de l’énergie et de la technologie, Pékin investit massivement dans le Royaume.
Toutefois, ce partenariat dynamique, largement consolidé dans le reste du pays, gagne aujourd’hui à s’étendre à l’ensemble du territoire national.
Une telle évolution s’inscrirait pleinement dans la logique d’une coopération stratégique renforcée, sans remettre en cause les principes fondateurs de la diplomatie chinoise, notamment celui de la non-ingérence dans les questions de souveraineté, un principe auquel Pékin reste attachée en raison de ses propres vulnérabilités géopolitiques (Taïwan, Tibet, mer de Chine méridionale). Elle évite ainsi de prendre position dans des dossiers territoriaux susceptibles de créer des précédents.
Cela dit, le contexte international évolue, et avec lui les attentes envers les grandes puissances. La Chine, si elle aspire à jouer un rôle global majeur, devra peut-être à terme faire évoluer sa lecture strictement économique de certains partenariats.
Le Maroc, quant à lui, n’attend pas un alignement idéologique, mais une forme de cohérence. Pékin dispose d’une fenêtre pour transformer sa présence économique en engagement politique , dans le respect des alliances construites sur la durée.
Un moment charnière pour la région
Le dossier du Sahara n’est plus une question locale : il est devenu un révélateur des nouvelles lignes de fracture et d’alliance dans le monde multipolaire qui émerge.
En misant sur une diplomatie d’ouverture, des projets d’envergure, et une proposition politique crédible, le Maroc s’affirme comme un acteur pivot dans la reconfiguration du continent africain.
Les États qui refusent de bouger risquent de se retrouver à l’écart. Car le train de l’Histoire avance, et le Maroc, lui, est déjà monté à bord.