Correspondance du Maroc  par Abderrazaq MIHAMOU

La hiérarchie du football continental a vacillé ce samedi. Alors que l’on attendait une démonstration de force des cadors africains, cette journée de compétitions a plutôt mis en lumière les lacunes tactiques des favoris et l’émergence d’une discipline de fer chez certains outsiders. Entre nuls frustrants et leçons de football, retour sur une journée riche en enseignements.

Sénégal et Maroc : Les « Lions » en manque de griffes

C’était l’affiche la plus attendue : le choc des titans entre le Sénégal et la République Démocratique du Congo. Pourtant, le spectacle n’a pas été à la hauteur des espérances des supporters d’Aliou Cissé. Face à des Léopards regroupés et extrêmement combatifs, les Lions de la Teranga ont livré une prestation poussive, manquant cruellement de créativité au milieu de terrain. Score final décevant, mais surtout une impression d’impuissance face au bloc congolais qui aurait même pu l’emporter en fin de match sur contre-attaque.

Le constat est quasi identique pour le Maroc. Les demi-finalistes du Mondial 2022, bien que dominateurs dans la possession, ont semblé s’enferrer dans un jeu stéréotypé. Face à une opposition pourtant à leur portée, les Lions de l’Atlas ont multiplié les centres stériles, affichant une déconnexion inquiétante entre leur ligne d’attaque et leurs milieux créateurs. Pour ces deux nations, le statut de favori pèse lourd, et le doute commence à s’installer.

La démonstration nigériane, le naufrage tunisien

S’il y a une équipe qui a marqué les esprits aujourd’hui, c’est bien le Nigeria. Opposés à une équipe de Tunisie méconnaissable, les Super Eagles ont livré une partition frôlant la perfection.

Dès l’entame de jeu, l’organisation tactique du Nigeria a étouffé les velléités tunisiennes. Portés par un pressing haut et des transitions fulgurantes, les Nigérians ont dominé tous les compartiments du jeu. En face, les Aigles de Carthage ont paru « effacés », incapables de répondre à l’impact physique et à la justesse technique de leurs adversaires. Cette défaite sans appel pour la Tunisie pose la question du renouvellement de son système, alors que le Nigeria s’affirme comme l’épouvantail de la compétition.

Les derbys et les duels tactiques : Ouganda, Tanzanie, Bénin et Botswana

Dans l’ombre des géants, les autres rencontres ont offert des scénarios intenses :

  • Ouganda vs Tanzanie : Ce derby d’Afrique de l’Est a tenu ses promesses en termes d’intensité, sinon de buts. Le match s’est résumé à une bataille de tranchées au milieu de terrain. L’Ouganda a tenté d’imposer un rythme physique, mais la Tanzanie, très disciplinée derrière, a su laisser passer l’orage pour procéder par contres. Un match haché par les fautes qui témoigne de la rivalité grandissante entre ces deux nations, se quittant sur un score qui ne fait les affaires de personne.
  • Bénin vs Botswana : Les Guépards du Bénin ont dû faire preuve de patience. Face à une équipe du Botswana venue clairement pour chercher le point du nul avec un bloc très bas, les Béninois ont longtemps buté sur un mur. C’est finalement dans le dernier quart d’heure que la faille a été trouvée sur un coup de pied arrêté, illustrant le pragmatisme nécessaire dans ces matchs pièges. Le Botswana pourra nourrir des regrets, ayant tenu tête pendant 80 minutes avant de craquer mentalement.

Une remise en question nécessaire

Cette journée du 27 décembre 2025 restera comme celle des paradoxes. Si le Nigeria a envoyé un message clair au reste du continent, le Sénégal et le Maroc devront rapidement retrouver leur allant offensif sous peine de voir leurs ambitions sérieusement compromises. Le football africain prouve une fois de plus que les noms sur le papier ne garantissent plus la victoire : l’organisation et l’envie sont devenues les monnaies d’échange de la réussite.

Dans les coulisses : Entre tension feutrée et ferveur électrique

Derrière l’éclat des projecteurs et la rudesse des duels sur la pelouse, l’atmosphère dans les couloirs des stades ce 27 décembre était de plomb pour certains, et euphorique pour d’autres. Dans les travées du stade où les Lions de la Teranga ont concédé le nul, le silence pesant dans le vestiaire sénégalais contrastait violemment avec les chants de victoire qui s’échappaient de celui de la RD Congo, où les joueurs ont célébré ce point comme une véritable profession de foi. En zone mixte, les visages marocains étaient fermés, fuyant presque les regards des journalistes en quête d’explications sur ce manque de réalisme, tandis que l’état-major de la sélection tunisienne s’est enfermé dans une réunion de crise improvisée sitôt le coup de sifflet final retenti face au Nigeria. À l’inverse, l’organisation nigériane impressionnait jusque dans son logis : une discipline de fer imposée par le staff des Super Eagles, où même les célébrations étaient minutées pour ne pas perdre le focus. Entre les supporters ougandais et tanzaniens, la rivalité a failli déborder sur le parvis avant que la sécurité ne rétablisse l’ordre, rappelant que dans cette CAN, chaque détail, du bus des joueurs aux échanges tendus dans les loges VIP, participe à l’écriture d’une légende continentale sous haute tension.

By AEF