J’ai déjà eu l’occasion de consacrer un article aux femmes afghanes dans l’espoir de voir leur situation s’améliorera, mais, hélas !, ça n’a fait qu’empirer.

’Nous espérions que les Talibans au pouvoir en Afghanistan respecteront leurs obligations en matière de droits humains’’, a exhorté Michelle Bachelet lors d’une réunion d’urgence organisée à Genève.

En plus d’être juste, c’est aussi une question de « nécessité pratique » : dans un contexte de crise économique et de séisme meurtrier, la contribution des femmes à l’activité économique est en effet « indispensable ».

Cela implique l’accès à l’éducation, la liberté de mouvement et la protection contre la violence, a rapporté la Haute-Commissaire, qui a demandé aux Talibans de fixer une date précise pour l’ouverture des écoles secondaires pour les filles, de garantir « un enseignement de qualité, sans discrimination », ainsi que des ressources pour les enseignants.

Prise de contact avec d’autres pays de culture musulmane

En tant qu’autorités de facto exerçant un contrôle effectif, « les Talibans sont les premiers responsables des obligations légales de l’Afghanistan en vertu des traités internationaux », notamment l’obligation d’éliminer la discrimination à l’égard des femmes et de garantir le droit des femmes à une participation égale à la vie publique.

Dans ce contexte, Mme Bachelet a encouragé les autorités à prendre contact auprès de pays de culture musulmane ayant une expérience de la promotion des droits des femmes et des filles, tels que garantis par le droit international.

La récente visite d’une délégation de l’Organisation de coopération islamique (OCI) constitue, selon elle, une étape importante à cet égard.

Possibilité d’ouvertures dans certaines régions du pays

Des efforts plus concertés de la part de la communauté internationale sont nécessaires pour insister auprès des autorités de facto afin qu’elles rétablissent, protègent et promeuvent de toute urgence les droits des femmes et des filles afghanes, a appuyé Mme Bachelet : « Il existe certaines possibilités à cet égard. Dans certaines régions du pays, les gouverneurs appliquent des politiques qui offrent des options aux femmes et aux filles. Nous devrions nous appuyer sur ces ouvertures pour développer la participation, l’éducation et les opportunités économiques des femmes », a appuyé Mme Bachelet en exhortant la communauté internationale à soutenir des initiatives en cours de dirigeantes et de penseuses afghanes.

Détention et torture de manifestantes pacifiques

Depuis qu’ils ont saisi le contrôle de l’Afghanistan en août 2021, les talibans sont les autorités de fait du pays. Bien qu’ils se soient publiquement engagés dans un premier temps à respecter les droits des femmes et des filles, les talibans ont introduit des politiques de discrimination systématique qui portent atteinte à leurs droits.

Les femmes et les filles du pays ont répondu à cette répression par une vague de manifestations. En réaction, les talibans ont harcelé et brutalisé des manifestantes et les ont soumises à des arrestations et des détentions arbitraires, des disparitions forcées, et des actes de torture physique et psychologique.

Amnesty International a recueilli les propos d’une manifestante qui a été arrêtée et incarcérée pendant plusieurs jours en 2022. Décrivant son traitement en détention, elle a déclaré à Amnesty International : « Les gardiens talibans n’arrêtaient pas de venir dans ma cellule pour me montrer des images de ma famille. Ils répétaient sans cesse: Nous pouvons les tuer tous, et tu ne seras pas capable de faire quoi que ce soit. Ne pleure pas, ne fais pas de scène. Après avoir manifesté, tu aurais dû t’attendre à connaître des journées comme celle-ci. »

Elle a également dit avoir été sauvagement frappée : « Ils ont fermé la porte à clé. Ils se sont mis à me hurler dessus. Un membre des talibans a dit : « Mauvaise femme. Les États-Unis ne nous donnent pas d’argent à cause de vous, bande de salopes” […] Et puis il m’a donné un coup de pied. Le coup était si fort que j’ai eu une blessure au dos, et il m’a aussi mis un coup de pied dans le menton […] Je sens encore la douleur dans ma bouche. J’ai mal dès que je veux parler. »

La responsabilité de la communauté internationale

Amnesty International demande à la communauté internationale d’imposer certaines mesures face au comportement des talibans, comme des sanctions ciblées ou des interdictions de voyager, par l’intermédiaire d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, ou de peser d’une autre manière afin d’obliger les talibans à rendre des comptes pour le traitement réservé aux femmes et aux filles, sans nuire à la population afghane.

« Les talibans privent délibérément des millions de femmes et de filles de leurs droits fondamentaux, et les soumettent à des discriminations systématiques », a déclaré Agnès Callamard.

« Si la communauté internationale s’abstient d’agir, elle abandonnera les femmes et les filles d’Afghanistan, et fragilisera les droits partout ailleurs. »

Par Mustapha Bouhaddar pour Maghreb Canada Express, Vol. XX, N°08 , page 02, MOIS D’AOÛT 2022 .

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