Par Abderrafie Hamdi (Rabat, Maroc)

Les relations maroco-mauritaniennes, dans leurs multiples dimensions, n’ont pas toujours été, à mon avis, au centre des préoccupations de l’opinion publique marocaine. J’ose même avancer que même une partie des élites marocaines n’a pas accordé à ces relations l’intérêt qu’elles méritent. Cela ne diminue en rien l’importance des liens bilatéraux entre les deux pays, tant au niveau officiel qu’au niveau populaire. En effet, les Mauritaniens vivant au Maroc – qu’ils soient étudiants universitaires, commerçants, hommes d’affaires ou touristes – trouvent dans la société marocaine un environnement qui les accueille avec fluidité et harmonie. Cela s’explique par plusieurs facteurs, notamment les liens historiques et géographiques communs, l’unité religieuse et le rite malékite, ainsi que l’extension tribale entre les deux peuples.

Ce propos trouve son contexte dans l’intérêt croissant que porte dernièrement l’opinion publique marocaine à la dynamique politique qui caractérise la Mauritanie Grâce à la stabilité de son régime politique sous la présidence de Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, la Mauritanie a su sortir de la spirale des coups d’État récurrents et se concentrer sur l’enracinement de l’expérience démocratique. Cette évolution a permis au pays de se repositionner sur la scène régionale, en particulier avec l’exploitation de ses ressources en gaz naturel.

Les médias marocains, traditionnels comme numériques, ont suivi avec intérêt les dernières élections présidentielles mauritaniennes et leur atmosphère. De même, la visite du président mauritanien au Maroc, bien qu’à caractère privé, et son accueil par Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Casablanca, ont été perçus comme un signe de renforcement du partenariat entre les deux pays, allant au-delà du cadre protocolaire.

Certains estiment que l’appréhension algérienne vis-à-vis de tout rapprochement maroco-mauritanien est liée à la question du Sahara marocain. Cependant, ce qui semble inquiéter davantage l’Algérie aujourd’hui, c’est le modèle démocratique émergent en Mauritanie. Ce pays a démontré sa capacité à assurer une alternance pacifique au pouvoir, avec un retour de l’armée à son rôle naturel de protection des frontières, ce qui met le régime militaire algérien dans une position embarrassante face à son propre peuple, surtout qu’il reste le dernier régime militaire de la région.

Le succès de la Mauritanie dans cette trajectoire la rapproche davantage de l’axe « Atlantique démocratique », dont le Maroc et le Sénégal forment les piliers essentiels. En outre, les relations mauritano-sénégalaises, autrefois tendues, connaissent aujourd’hui une nette amélioration, notamment avec l’exploitation commune des ressources en gaz naturel à leur frontière.

Malgré les tentatives de l’Algérie de semer la discorde, comme lors de l’ouverture par le Maroc et le Sénégal d’une ligne maritime entre Agadir et Dakar, la Mauritanie a choisi de ne pas céder à ces manœuvres. Au lieu de cela, elle comprend que le projet de l’initiative atlantique représente une opportunité en or pour renforcer son économie, notamment en capitalisant sur ses ports stratégiques.

Dans ce contexte, le président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani se trouve face à une opportunité historique de prendre une position politique courageuse qui s’aligne avec les intérêts de son pays et de son peuple. À l’image de la position claire adoptée par le président français Emmanuel Macron en faveur de la marocanité du Sahara, la Mauritanie pourrait s’affranchir de la politique de « neutralité positive » imposée par les conditions de la guerre froide et la fragilité de son régime politique d’autrefois.

Une position explicite de la Mauritanie concernant le Sahara marocain renforcerait son statut régional et ouvrirait de nouvelles perspectives d’intégration et de coopération dans la région, transformant celle-ci en une unité cohérente et harmonieuse, au service des intérêts de ses peuples, loin des calculs idéologiques dépassés.

Nouakchott connaît l’Histoire et en conserve une partie importante de ses archives écrites, elle a traversé la géographie avec ses dunes de sable, et elle comprend les hommes et les femmes dans l’extension de leurs lignées et de leurs tribus.

De manière plus globale, les récents événements en Syrie montrent que la communauté internationale en a assez des milices où qu’elles se trouvent, après qu’elles aient épuisé leur rôle. Aujourd’hui, le monde tend à les éradiquer. Après Damas, l’attention se tournera vers la Libye, puis vers le Sahel africain. C’est ce qui pousse le régime militaire algérien à perdre son sang-froid et à tenter de déstabiliser la Mauritanie en cherchant à créer un nouvel ordre politique basé sur l’armée, comme le rapportent rapports et médias internationaux .

Enfin, la récente réunion trilatérale aux Émirats arabes unis entre Son Altesse le Sheikh Mohammed ben Zayed Al Nahyan, Sa Majesté le Roi Mohammed VI, et le Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, a offert à ce dernier l’occasion de constater le niveau de développement atteint par ce pays du Golfe. 

Penser que ce succès repose uniquement sur le pétrole serait une erreur. Il est avant tout le fruit de la vision globale et du courage d’un homme, Sheikh Zayed ben Sultan Al Nahyan, qui a pris une décision révolutionnaire en 1971 en unifiant sept émirats sous le nom des Émirats arabes unis. Que Dieu ait son âme. L’Histoire nous enseigne que l’hésitation ne construit pas l’avenir.

By AEF