Tout le monde sait que le père Noël se trouve au Canada, quelque part au pôle nord. Mais ce qu’on ne sait pas, c’est que de plus en plus d’immigrants, toutes confessions confondues, commencent à y croire et à lui écrire des lettres.
Un vieux «importé», plus malin que les autres, et se rendant compte que le noël de cette année est bien particulier, a rédigé sa lettre plusieurs mois à l’avance, pour mettre toutes les chances de son côté.
Eh bien, croyez-le ou non, nous avions intercepté sa lettre ! Et En voici le contenu :
Cher Papa Noël, Assalamou Alaykoum!
Tu es vieux, je le suis moins! Mais assez quand même pour jouer « cartes sur table » avec toi. Eh bien…Voilà, je voudrais un cadeau pour cette année! C’est le premier et « peut-être » le dernier que je te demande. Tu vas donc pas me décevoir! Ça ne se fait pas ! surtout pas entre « vieillards » qui en ont vu de toutes les couleurs, n’est-ce pas? … Ce que je voudrais, eh bien… c’est un travail!.
Aie! je vois d’ici ton bonnet se dresser sur ta tête de surpirse! Mais tu as beau être surpris, tu ne pouurais jamais l’être autant que Papa tout court, qui doit se retourner maintenant dans sa tombe! Donc, respire fort, prends un bon coup de nectar et écoute-moi!
Je sais, je sais que c’est trop te demander! surtout en ces temps difficiles! Je sais que le moment est mal choisi et que les temps sont plutôt au licenciement, même pour les bons nouveaux fans de Papa Noël comme moi! Récession oblige!
C’est fou ce qu’il y a de gens sur le marché de l’emploi ! Certes! Mais pas autant que sur le marché du rêve!. Car vois-tu? même quand on prive un être humain de toutes ses libertés, il subsiste toujours, chez lui, celle du rêve! Et plus tu brimes un individu, plus il tend vers «le point de non retour» du coté de cette liberté! Aussi, n’est prisonnier que celui qui a les pieds bien ancrés sur terre !
Toutefois le cadeau demandé est un cadeau pour dix!. En plus, je pense que j’ai bien mérité ce cadeau: Car depuis que je suis au Québec, j’incarne la sagesse même! Prêchant dans mon entourage le respect des institutions et me forçant à la persévérance et au refus des « solutions faciles »! Tu vois ce que je veux dire n’est-ce pas?. Ajouter à cela que je fais tout pour éviter les chicanes, même (et surtout) celles constitutionnelles!
Avant de te quitter par mon clavier et non par mon ordinateur, je te prie, cher Papa Noël, de localiser mon cadeau au Québec car je m’y suis très bien intégré du moment que je partage avec ce peuple la langue de Molière (ou du moins nous le croyons tous), le romantisme de Victor Hugo, de Lamartine et d’Antoine de Saint-Exepury ainsi que la rigueur scientifique de Descarte et la philosophie percutante de Voltaire. Ajouter à cela tout l’échange culturel bidirectionnel qu’enrichit notre vocabulaire de merveilleux mots, comme tabernacle, hostie et calice d’une part et In’al lahmar taa el hallouf taa..etc d’autre part ! Ah cher Papa Noël! Il faudrait voir l’émerveillement de mes nouveaux compatriotes quand ils m’entendent sacrer dans un bilinguisme impeccable!
Bref, et pour ne pas te retenir plus longtemps, je te prie, cher Papa Noël, d’agréer l’expression de ma très haute considération tout en te priant de bien vouloir prendre soin de ta barbe et de ton embonpoint: C’est tellement rassurant pour les grands enfants que nous sommes !
Un immégré bien intégré (Juillet 1999)