Le mois d’octobre dernier, j’ai rejoint l’université de Bielefeld en Allemagne afin d’accomplir une mission de recherche sur l’impact de la pandémie du Coronavirus sur les relations sociales dans le cadre d’un projet de recherche avec la même université.  Le projet porte sur toute l’année académique. L’Université de Bielefeld fait partie des meilleures universités d’Europe pour la qualité de la recherche qui y est exercée et pour ses cursus universitaires innovateurs. Situé au centre de l’Allemagne, à la lisière de la fameuse Teutoburger Wald – la forêt profonde dans laquelle les Romains furent écrasés par les tribus germaniques – Bielefeld offre tous les avantages d’une ville universitaire moderne, dotée d’une réputation internationale, ouverte à la culture, à l’agrément de la vie quotidienne ainsi qu’aux sports.

Lorsque les cas de contamination au Coronavirus ont commencé à être reportés aux quatre coins du globe, la réponse de l’Allemagne, comme celle de nombreux pays, fut de fermer certains établissements tels que les écoles, les lieux de travail et les frontières internationales afin de limiter la propagation du virus. Depuis, tous les cours et séminaires universitaires se produisent en ligne, pandémie oblige.

Le mois d’octobre dernier, les magasins, les cafés, les restaurants, les musées et autres lieux de culture avaient ouvert avec le port du masque obligatoire et le respect des autres mesures-barrière. Mais dès le mois de novembre, le gouvernement allemand a décidé un semi-confinement, c’est à dire la fermeture de tous les commerces non-essentiels.

La campagne vaccinale en Allemagne a été lente : Jusqu’à aujourd’hui seulement 30% de la population a été vaccinée (environ 27 millions sur 83 millions d’habitants). La campagne vaccinale a, dès le départ, privilégié la population à risque : le corps médical, les ehpad et les personnes très âgées. L’Allemagne espère assurer la vaccination de 70% de sa population avant la fin juillet et le retour à la vie normale le mois de septembre 2021.

Le nombre moyen de nouveaux cas recensés chaque jour a augmenté de plus de 4800 au cours des 3 dernières semaines, à 18 % de son précédent pic d’infections.

Pendant le mois d’avril, l’Allemagne a connu une flambée du virus. Les cas de contamination étaient en hausse avec 20837 nouveaux cas en moyenne recensés chaque jour. Cela représente 81% du pic des infections — le nombre moyen le plus élevé de cas de contamination quotidiens a été reporté le 21 décembre dernier.

A la mi-avril, le gouvernement a dé-confiné légèrement en autorisant l’ouverture des commerces, mais une semaine plus tard il décide le couvre-feu de 22h à 5h. C’est la première fois que des couvre-feux à l’échelle nationale vont être imposés automatiquement pour tenter de juguler la vague épidémique. Hormis les coiffeurs, les commerces non-essentiels devront fermer de nouveau, les réunions privées sont limitées à une personne par ménage et les activités sportives collectives sont suspendues. Au-delà de 200 infections, les écoles et les crèches fermeront et le gouvernement se réserve le droit d’adapter ces freins en fonction de la situation. Les écoles n’accueilleront que les élèves testés deux fois par semaine et elles devront fermer lorsque le taux d’incidence dépassera 200.

Il y a eu 3303997 cas de contamination et 81779 décès liés au coronavirus recensés dans le pays depuis le début de l’épidémie. Les mesures barrière sont strictement renforcées.  Dans la foulée, le Maroc a suspendu tous ses vols avec l’Allemagne et le reste de l’Europe jusqu’au 21 mai si la crise sanitaire ralentit. Dernièrement, La campagne de vaccination fonctionne de mieux en mieux et la lumière au bout du tunnel se rapproche.

C’est Mahatma Ghandi qui avait dit : « La grandeur d’une nation se mesure à la manière dont elle traite ses membres les plus vulnérables. » Une formule qui n’en demeure pas moins pleine de bon sens. Et sur ce point, la plupart des pays enregistre malheureusement de piètres résultats étant donné l’aggravation des inégalités sociales et de la pauvreté depuis le début de la pandémie.

La pandémie a mis en évidence à quel point les défis collectifs nécessitent des solutions globales. Elle a également montré comment un manque de solidarité complète et partagée entre classes sociales et entre pays peut conduire à des approches erronées et fragmentaires, ainsi qu’à des pandémies et crises nuisibles.

Comme nous l’a rappelé la COVID-19, les effets de l’activité humaine sur la planète ne respectent pas les frontières. La Terre est un système unique vivant et autorégulé, et elle exige un système d’évaluation et de contrôle partagé qui s’équilibre au niveau mondial. Nous avons besoin d’en tirer des leçons à l’échelle globale.

Tout récemment, le monde a célébré le 51ème Jour de la Terre. Le thème de cette année – «Restaurer notre terre» – est pertinent. Les écosystèmes de la planète approchent du point de non-retour par rapport au siècle dernier. Notre système économique actuel exerce une pression de plus en plus forte sur les ressources naturelles.

Créer un cadre pour protéger l’environnement et la biodiversité ne sera pas facile et se heurtera sans aucun doute à une résistance nationaliste ou populiste dans de nombreux pays. Mais, comme la maîtrise de la science, c’est une lutte de vie ou de mort, le monde a besoin d’une nouvelle approche à la nature, au climat, aux humains, à l’économie pour survivre et construire un avenir sain et meilleur.

La reprise post-Covid à venir donne à tous les pays l’opportunité d’élire des réformes allant dans ce sens. Nous devons repenser les bases de notre système socio-économique et primer les expériences réussies à long terme qui voient plus loin que le profit ou la simple rentabilité financière.

Par Moha Ennaji (*)  pour Maghreb Canada Express, Vol. XIX, N°05 , page 11 , MAI 2021

Note :

(*) Moha Ennaji est actuellement professeur-visiteur à l’université de Bielefeld, auteur de plusieurs livres, dont le plus récent intitulé «Le Paradigme Maghreb-Europe ».

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