Point de conjonction géostratégique entre les continents africain et européen, le Maroc est un espace d’émigration et de transition idéal vers l’Europe, et ce, avant qu’il soit à son tour un pays d’accueil et de destination finale pour les immigrants.

Cette évolution du contexte et du statut migratoire lui impose d’adapter son cadre réglementaire et institutionnel pour répondre aux nouvelles donnes migratoires mais aussi aux dynamiques régionales et internationales qui l’impactent.

Actuellement, la migration subsaharienne ne concerne encore, que dans une relative cadence, l’Europe, puisque la plupart, des migrants sub-sahariens s’installent pour des périodes plus ou moins longues au Maroc, leur nombre est estimé ainsi à plus de 100 000 personnes. Cette situation risque de s’aggraver davantage autant pour le Maroc que pour l’Europe.

La migration offre d’immenses possibilités et avantages – pour les migrants eux-mêmes, les communautés d’accueil et les communautés d’origine. Elle peut cependant entraîner un certain nombre de défis importants lorsqu’elle est mal réglementée, notamment des infrastructures sociales surpassées par l’arrivée brusque d’un grand nombre de personnes, ou encore les risques parfois mortels entrepris lors de voyages dangereux et périlleux.

Le Maroc n’est donc plus seulement un pays de passage

Si pour certains pays du Nord, le Maroc est perçu comme un pays de transit vers l’Europe, il est devenu en réalité et surtout un pays d’immigration.

Comme le Maroc renforce son « africanité » à l’égard de ses voisins du Sud, il est notamment devenu aux yeux de son voisin du Nord, l’Union européenne, le  ‘‘concierge’’, qui devrait surveiller leurs frontières extérieures, empêcher tout seul ou surveiller les arrivées de migrants africains et de réfugiés.

En tant que pays politiquement stable, en voie de modernisation économique et sociétale, offrant une proximité géographique et linguistico-culturelle avec l’Europe, le Maroc attire un grand nombre d’étrangers désireux de s’y expatrier.

Le Maroc est aussi un pays d’accueil et de destination pour différents types d’immigrations, d’origines géographiques d’Afrique, d’Asie et d’ailleurs. Les privilèges et attraits qu’offre le Maroc comme pays de destination sont de nature géographique, économique, linguistico-culturelle, mais aussi politique.

Le Maroc n’a pas pour tâche de défendre les frontières autres que les siennes, il n’a pas pour vocation d’être le gardien de l’Europe hormis un partenariat bien clair.

Le Maroc résiste à une situation très compliquée vis à vis de l’immigration illégale

Le Maroc subit les conséquences de la situation difficile dans certains pays de l’Afrique subsaharienne, victimes de la guerre et de la famine…

Ainsi, le migrant contraint est considéré comme étant toute personne étrangère se trouvant sur le territoire marocain particulièrement pour les raisons liées au transit vers un autre pays, à la demande d’asile ou de statut de réfugié, à l’insécurité, la guerre ou la persécution dans le pays d’origine ou au trafic ou la coercition.

Si au départ, le Maroc n’est pas une destination ultime, bien fréquemment, le transit se convertit en séjour forcé plus ou moins indéterminé dans le temps. En conséquence, les difficultés que pose la traversée du détroit ou de l’océan vers l’Espagne et les Iles Canaries font que le Maroc devienne une terre d’escale constante.

Raisons pour rester au Maroc

La sécurité dont jouit le pays est la principale raison du choix du Maroc ; d’autres considérations sont évoquées : les conseils de membres de la famille, le transit par la Maroc vu sa proximité de l’Europe, les études, l’existence d’une politique migratoire offrant plus de droits aux migrants, le mariage ou regroupement familial et enfin la facilité de s’y rendre.

Les migrants qui voudraient rester au Maroc évoquent comme raison principale le sentiment de sécurité en premier lieu, viennent ensuite les meilleures conditions de vie, la possibilité d’accéder au marché du travail, les attitudes et comportements positifs des marocains envers les migrants et enfin, les possibilités de régularisation de leur situation.

Stratégie nationale d’immigration et d’asile

Le Maroc a adopté depuis 2013 une nouvelle stratégie qui vise à opter pour une approche humaniste de la migration, conforme à l’image que le pays entend projeter de lui-même en ce qui concerne le respect des droits humains tels qu’ils sont universellement reconnus. visant d’abord à positionner le Maroc sur le continent comme étant un pays ouvert et ‘‘fraternel’’, des campagnes de régularisation des étrangers en situation irrégulière furent adoptées. Ainsi, le Maroc se devait d’adopter une disposition ouverte par rapport à la migration.

Dans ce cadre, cette stratégie a constitué une véritable inflexion au niveau de la gouvernance migratoire, en y intégrant la centralité du paradigme du respect des droits des migrants dans une logique globale, solidaire et inclusive.

L’espace euro-méditerranéen dominé par les défis

Le Maroc agit dans un environnement régional marqué par des contraintes de plus en plus impérieuses face auxquelles il déploie des efforts considérables en matière de lutte contre le terrorisme et toutes les formes de criminalité transfrontalière, dont les mafias d’émigration irrégulière…

A ce sujet, il est important d’observer que la gouvernance migratoire au Maroc s’inscrit dans une approche qui s’articule autour de plusieurs constituantes arrangeant notamment la dimension humaniste protectrice des migrants, ainsi que la dimension opérationnelle de lutte contre les réseaux de trafic des migrants.

Vers un nouveau pacte de coopération fondée sur la responsabilité partagée

Le Pacte mondial pour les migrations représente une occasion historique d’améliorer la coopération internationale en matière de migration et de renforcer la manière dont contribuent les migrants et la migration au développement durable. Le nombre de migrants devrait augmenter en raison d’un certain nombre de facteurs dont la croissance démographique, la connectivité croissante, les guerres, le commerce, le renforcement des inégalités, les déséquilibres démographiques et les changements climatiques.

Pour faire face à l’émergence de ce fléau, un nouveau pacte doit pallier aux failles de la politique migratoire européenne basée essentiellement sur les contrôles aux frontières, en repensant le partenariat européen avec le Maroc vers une approche commune fondée sur la responsabilité partagée.

On ne peut vouloir s’inscrire dans des flux d’échanges économiques, politiques et culturels tout en rejetant les flux humains, qui les accompagnent certainement…

Par Abdel-Jalil Zaidane, Tétouan (Maroc), pour Maghreb Canada Express , Vol. XX, N°12, Page 06, Édition de DÉCEMBRE 2022.

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