Les Parisiens n’arrivent pas à faire face à l’arrivée des prochains jeux olympiques

En effet, les tickets de métro et de train ont doublé, sans compter les places de parking de plus en plus chères. Il faudra ajouter à ça le scandale des travailleurs émigrés sans papiers qui travaillent illégalement aux postes les plus accidentogènes. Notamment sur le chantier du village des athlètes ou encore sur la piscine.

D’après le magazine « Jeune Afrique » du 25/01/2023, les organisateurs de la dernière Coupe du monde de football doivent rire sous cape. Mis à l’index par des activistes français dénonçant les « chantiers du scandale » qataris, ils savourent aujourd’hui les titres de presse internationaux qui relaient les témoignages de travailleurs immigrés, notamment africains, dénonçant leurs conditions de travail sur les sites des Jeux olympiques qui doivent se tenir à Paris, dans un an et demi…

Depuis le second trimestre de 2022, l’inspection du travail a révélé de nombreux cas de travailleurs sans-papiers. Pour lutter contre ceci, l’inspection du travail a même créée une unité spécialisée qui contrôle près d’un site par jour depuis plus de 2 ans. Certains travailleurs ont accepté de témoigner pour lever l’omerta qui pèse sur ce phénomène.

Pendant 3 mois Gaye, malien qui travaille en France depuis cinq ans, raconte avoir travaillé de 9 heures à 17 heures ou parfois 19 ou 20 heures. La journée étant payée 80 euros, heures supplémentaires effectuées ou pas.

 À qui la faute ?

En juin dernier c’est neuf travailleurs en situation irrégulière qui sont identifiés sur un chantier avec en maitre d’ouvrage la SOLIDEO (Société de livraison des ouvrages olympiques) et le parquet de Bobigny qui ouvre une enquête pour « travail dissimulé » et « emploi d’étranger sans titre en bande organisée ».

La Solideo a répliqué en imputant la responsabilité aux sous-traitants.  Nicolas Ferrand ayant déclaré avoir rompu le contrat avec le sous-traitant en question et le géant du bâtiment qui avait recours lui aussi à ces pratiques. Il souligne : « On a écrit au procureur de Bobigny pour dire qu’on souhaite se joindre aux procédures contre les employeurs indélicats » et en rappelant « la volonté d’exemplarité des chantiers des JO ».

Le travail illégal serait mis en place par des entreprises turques, sous-traitantes, qui se placent rapidement en liquidation lorsque des soupçons pèsent sur elles.

Un ami de Gaye confie : «Moi j’ai donné deux fois des papiers différents à la même entreprise, j’ai été pris ». Mais dès qu’une inspection arrive les patrons expédient directement les travailleurs sans- papier. Le patron m’a dit :  » Tu reviens plus !  » se souvient Gaye. Il a notamment travaillé au futur centre aquatique et à la tour Pleyel tous les deux en Seine Saint Denis ainsi qu’au futur village des athlètes.

L’espoir réside dans la régularisation. En effet, l’État français souhaitait créer des titres de séjours dans les « métiers en tension ». Jean-Albert Guidou, Secrétaire général à l’union locale CGT Bobigny, a déjà accompagné plusieurs personnes dans leur régularisation et victoire ! Une quinzaine de personnes ont réussi à obtenir des titres de séjours. Certains résidants en France depuis plus d’une décennie ! Ceci résultant de la médiatisation de leur situation dans les médias.

Accepter les conditions ou… partir

Le parallèle est limpide. Que ce soit au niveau du village olympique, à Saint-Denis, ou du centre aquatique du parc des sports de Marville, tous deux situés en Seine-Saint-Denis, des anciens ouvriers décrivent une gestion inhumaine du personnel, des rémunérations insuffisantes, des journées de travail à rallonge dont les heures supplémentaires ne sont pas payées, des congés payés inexistants et parfois même des journées entières non rémunérées.

Des situations qui reposent sur un chantage classique rendu possible par l’absence de statut des employés clandestins. Les sans-papiers n’auraient d’autre choix que d’accepter les entorses au droit du travail ou de… plier bagages. De surcroît, la nécessité d’achever les chantiers avant les rendez-vous du grand événement sportif international rend difficile l’organisation d’une pression sociale progressive.

Si les déboires des clandestins sur les chantiers « sportifs » français rappellent légitimement ceux des ouvriers des travaux qataris, la comparaison n’est pas toujours vraie.

En effet, durant les préparatifs de la Coupe du monde, 6 500 travailleurs seraient morts, parfois des immigrés légaux venus avec des papiers qu’ils se seraient vu confisquer. Il n’en reste pas moins que l’emploi de clandestins sur des projets promus par l’État français – chantre théorique des droits humains – est une bombe politique à retardement.

Nombre de scandales agitent les Jeux Olympiques de Paris en plus de ceux-là : 45 000 bénévoles non payés et non logés, prix et attribution des billets, étudiants expulsés. Difficile d’envisager des jeux olympiques sereins au vu de tous ces événements et encore à 1 an du lancement officiel. Les jeux qui devaient faire rayonner la France auront-ils finalement eu l’effet inverse ?

Une pensée à tous ces sans papiers qui travaillent clandestinement en France pendant des années, dans le bâtiment, la restauration,  le ménage et autres. Ils ne bénéficieront peut-être jamais de la sécurité sociale, la retraite, et les congés payés.

L’Etat français profite de cette population qui participe à l’économie française et qui risque l’expulsion un jour ou l’autre. Une main d’oeuvre exploitée par des entreprises et des sous-traitants sans scrupule. Ne pas régulariser ces ouvriers est un crime contra l’humanité !

“Un édifice bâti sur l’inégalité, la lutte, et l’exploitation du faible, est irrémédiablement condamné à s’écrouler.”

Par Mustapha Bouhaddar, pour Maghreb Canada Express, Vol. XXII, N°02, Page 02, Avril 2024

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