Par Abdel-JalilZaidane,Tanger (Maroc) pour Maghreb Canada Express, Vol. XIX, N°09 , pages 13-14, Septembre 2021

 Cet ouvrage est fondé sur une étude réalisée sur la ville Trois-Rivières. Il tente d’analyser les dynamiques économiques, politiques et sociales ayant favorisé la revitalisation de cette ville après une crise économique. Il traite de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion comme un processus dynamique et complexe, recouvrant des dimensions cognitives, d’action et de régulation. Il essaye de mettre en évidence le jeu des acteurs en faisant état d’un ensemble de pratiques, d’initiatives de la société civile, de politiques publiques et de mesures gouvernementales.

La ville de Trois-Rivières est devenue en 1998, « capitale du chômage ». Ancienne villes industrielle, elle a connu, à partir des années 1960, un important déclin économique provoquant de nombreuses fermetures d’usines et la perte de milliers d’emplois.

TROIS-RIVIERES, UNE VILLE EN CRISE QUI SE PREND EN MAIN

Le grand Trois-Rivières est la fusion en 2000 de Trois-Rivières, Trois-Rivières Est et Cap-de-la-Madeleine. Elle a joui, jusqu’au début des années 1960, d’une situation avantageuse dû à sa position géographique favorable dotée d’installations portuaires et de ressources hydrauliques qui ont permis le développement de l’industrie qui emploie des dizaines de milliers de personnes.

En 1960, la nationalisation de l’électricité a fait perdre à Trois-Rivières l’avantage stratégique en matière d’accès à l’énergie à moindre coût et a fragilisé le marché du travail suite à la fermeture des manufactures et des grandes.

Depuis le début des années 1980, plusieurs organismes d’aide à la communauté vouée à la lutte contre la pauvreté, à l’insertion en emploi ont vu le jour. Leurs activités s’inscrivent dans une quête de formules alternatives susceptibles d’assurer la réinsertion en emploi des personnes peu qualifiées ou analphabètes.

Les différentes initiatives gouvernementales témoignent de la volonté des différents paliers du gouvernement d’être de vrais acteurs de développement économique et social et des agents de relance économique.

Il a été constaté que la culture de concertation est devenue productrice de cohésion et constitue un mécanisme de gestion des interfaces entre la municipalité et les différents biveaux d’intervention et de programmes. Elle permet d’éviter la balkanisation des actions et de bien gérer les logiques contradictoires des actions politiques technocrates et communautaires.

DES PROJETS STRUCTURANTS

Qu’ils soient dans le domaine du développement économique et industriel, de l’aide aux petites entreprises, de l’économie sociale ou du développement communautaire, des projets visaient la relance de l’économie des Trois-Rivières et de cerner les différentes facettes des dynamiques locales et territoriales.

La structuration de l’économie Mauricienne est passée par la mise en place de projets structurants selon une politique basée sur le développent de synergie entre les acteurs, la mise en réseau, l’innovation sociale et la création d’une dynamique locale et territoriale.

Un observatoire sur le système régional d’innovation a été mis en place en 2002 et en 2003 et la Mauricie a été choisie comme région pilote du plan d’innovation qui avait pour but le soutien des collectivités innovantes.

La Démarche de revitalisation des quartiers ouvriers, habités par les anciens employés des manufactures fermées, va au-delà du rajeunissement des infrastructures et de la restauration de l’habitat, des services et des ressources.

Du point de vue politique, cette démarche tend à responsabiliser le pouvoir municipal sur l’impact de ses décisions sur la vie des citoyens. Dans une dimension identitaire, la démarche cherche à accroitre le sentiment d’appartenance au milieu, à développer de nouvelles formes de solidarité et à renforcer la capacité des organismes communautaires.

LA REINSERTION EN EMPLOI, UN PROCESSUS GRADUEL

La prise en considération des trajectoires des individus et l’évaluation de leur état de préparation face au marché de l’emploi est nécessaire pour identifier les individus aptes à réintégrer un emploi. Il y a des personnes qui nécessitent des petites interventions mais il existe d’autres qui exigent plus pour répondre aux normes de productivité que prévalent le marché de travail classique.

L’Habilitation des gens ne passe pas seulement par les programmes d’alphabétisation, un virage vers le développement économique local surgit comme une option viable et une réponse adéquate aux exclusions.

Les emplois de solidarité est l’un des programmes d’insertion de personne à faible productivité dans les entreprises. Ces dernières prennent en charge 50% des salaires des gens et le gouvernement les 50% restant. Une telle formule a des retombées cognitives, psychologique, identitaires et statutaires pour les individus et la collectivité. Il s’agit du passage de la logique d’aide à la logique d’investissement social et de transformation d’une mesure passive d’assistance à une mesure active de soutien au salaire.

Une autre action novatrice de réinsertion en emploi pour les jeunes est l’action jeune qui œuvre à la qualification sociale des jeunes décrocheurs par la formation professionnelle dans le domaine de la carrosserie et de l’automobile.

Sur le plan financier, tous ces programmes sont tributaires du financement externe pour assurer la pérennité de leurs services et garantir leur indépendance vis-à-vis de l’Etat.

TROIS-RIVIERES, LA MECQUE DE L’ECONOMIE SOCIALE

L’économie sociale s’est progressivement installée, comme un modèle de développement économique alternatif, malgré l’opposition des syndicats.

Selon une lecture économique, les entreprises sont décrites comme l’œuvre des marginaux travaillant à faciliter l’intégration des personnes et les faire accéder à l’autonomie économique

Selon la lecture sociale, les subventions sont considérées comme un investissement dont les retombés psychologiques sont inestimables.

Selon la lecture politique, dans le contexte Québécois et Canadien, l’intérêt que les gouvernements ont pour l’économie sociale exprime la tendance de concevoir le développement local comme le produit de forces économiques et d’une articulation entre ces forces.

LES FACTEURS EXPLICATIFS

Les facteurs qui font de l’expérience de Trois-Rivières une réussite sont au nombre de neuf :

1. La Qualité du leadership dont les principales composantes sont la durée, la permanence de l’action et la capacité de mise en marché

2. Le Rôle du territoire en matière d’ancrage identitaire et un espace d’action intégrée

3. La Culture de concertation et d’argumentation

4. La Réappropriation critique des discours, des programmes et des objectifs d’emploi-Québec

5. L’Entretien de confiance entre les partenaires institutionnels et communautaires

6. La Chaine cohérente de production de politiques

7. Le refus de se compartimenter et de se laisser compartimenter

8. L’articulation des avoirs expérientiels et des savoirs certifiés

9. L’approche de citoyenneté

La lutte contre la pauvreté est inscrite dans une perspective de cohésion sociale. La participation active permet de produire une nouvelle synergie entre l’économique, le social, le culturel et l’environnemental qui constituent les axes stratégiques du développement durable et intégré.

LES STRUCTURES MEDIATRICES

Les modalités développées dans l’expérience des Trois-Rivières témoignent de la reprise de confiance des divers intervenants dans la possibilité de changer les choses en misant sur des valeurs de solidarité, de justice sociale, de démocratie et de participation des citoyens à la vie de la société..

La territorialisation des initiatives de lutte contre la pauvreté dans Trois-Rivières vise trois objectifs : un d’ordre écologique permettant de favoriser un environnement propice à l’épanouissement de l’individu, le second d’ordre économique pour permettre à l’individu d’améliorer ses conditions de vie et le dernier d’ordre social visant le renforcement du sentiment d’appartenance à une communauté qui protège son identité, sa sécurité et son intégrité.

Grâce au travail des structures médiatrices, les gens parviennent à se doter de nouvelles capacités d’agir et de participer aux décisions les concernant. En effet, dans un monde axé sur la participation et la reconnaissance d’une démocratie multipolaire, les rapports sociaux ne peuvent que se fortifier par la coopération, la solidarité et le partenariat dans une perspective de réconciliation de l’individu et la société, entre l’être et l’être ensemble.

ENTRE L’ÉTAT, LE MARCHÉ ET LA SOCIETE CIVILE

La gestion territorialisée de la pauvreté a suscité des transformations des rapports entre l’Etat, le Marché et la Société Civile ainsi qu’une modification de leurs rôles respectifs.

Dans un tel système fondé sur la coopération et le partenariat, le rôle de l’Etat ne s’estompe pas, il se transforme et se recompose dans ses rapports avec le marché et la société civile.

Les initiatives Québécoises de lutte contre la pauvreté s’inscrivent dans des relations d’échange entre le local et le global. Le rôle du territoire ne se définit pas seulement en milieu production et de cohésion sociale, mais il devient un espace de régulation et de normativité et non un simple réceptacle de mise en œuvre des politiques.

CONCLUSION

Tout le long de leur analyse, les auteurs ont insisté sur les enjeux de coopération, de concertation et surtout de la légitimation des actions menées.

Les initiatives territoriales de lutte contre la pauvreté interpellent les acteurs à se projeter en dehors de la communauté locale en s’incorporant dans un processus global de transformation de la société et de mise en place d’une culture politique axée sur le droit et la démocratie participative.

Enfin, L’ouvrage nous apprend que si l’expérience de la ville de ‘’Trois-Rivières’’ a réussi, c’est grâce à la réunion d’une multitude de facteurs qui ont permis d’atteindre des résultats impressionnants et que l’expérience de Trois-Rivières peut être une source d’inspiration.

Par Abdel-JalilZaidane,Tanger (Maroc) pour Maghreb Canada Express, Vol. XIX, N°09 , pages 13-14, Septembre 2021

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